alainlemasson.fr

alainlemasson.fr

USA versus BNP Paribas

 

Beaucoup de choses ont été dites sur  l’offensive américaine à l’égard des banques coupables de contournement d’embargos. C’est ainsi qu’ont été notamment évoquées les ambitions des procureurs new-yorkais et la persistance d’une politique américaine décidément fâchée avec l’Europe au point d’en frapper les banques les plus performantes. On a aussi reproché aux Etats-Unis une forme d’impérialisme judiciaire.

C’est oublier que BNP Parisbas ou Deutsche Bank ne sont pas les seules banques visées. Bank of America fait notamment partie des nombreuses institutions ciblées par la justice américaine aux cotés des banques européennes.

On peut deviner deux bonnes raisons, l’une de politique extérieure, l’autre de politique intérieure, susceptibles d’expliquer à elles seules cette tonte fiscale sans précédent du monde bancaire.

La première concerne la Russie. L’arme des sanctions financières risque en effet de faire long feu si les banques ne jouent pas le jeu. Il faut être réaliste. Si la Russie se retire pas à pas des frontières ukrainiennes et si l’Europe signe tranquillement un traité d’association avec l’Ukraine, ce n’est pas par miracle. On peut imaginer que les  sanctions financières graduelles des Etats-Unis ont été terriblement efficaces jusqu’à présent. Et que  l’annonce de leur durcissement a fait réfléchir les Russes. Faisons confiance à la NSA pour tout savoir des avoirs russes à l’étranger et aux diplomates américains pour l’avoir fait comprendre à leurs homologues russes. En parallèle, montrer urbi et orbi que les Etats-Unis ne plaisantent plus en matière d’embargo  est une manière assurément crédible de faire monter la pression sur une gouvernance russe sensible au rapport de force.

Cette démonstration d’autorité du pouvoir  américain vis-à-vis des banques pourrait bien viser en outre un autre objectif, de politique intérieure celui-là. Ce serait en effet une manière de gommer dans l’opinion publique la part de responsabilité jamais reconnue mais bien réelle du gouvernement américain dans la crise des subprimes.  C’est en effet le Ministère du Logement à Washington qui avait la tutelle de la très fameuse Fanny Mae, cette agence étatique chargée du développement des crédits immobiliers par la titrisation. On doit aussi à ce ministère le renforcement des  contraintes aux banques pour accorder, sous peine de sanctions, des crédits  immobiliers  aux résidents démunis de certains quartiers, les crédits subprimes. Et on ne sait toujours pas son rôle exact dans l’extension de la garantie  publique à une part substantielle des crédits subprimes titrisés.

Républicains et Démocrates partageant les responsabilités dans ce dossier, ont l’un et l’autre intérêt au silence public. Le rapport, en novembre 2011, de la Commission du Congrès chargée d’enquêter sur la crise des subprimes, un rapport pour le moins nuancé, semblait avoir mis un terme à toute éventualité d’investigation ultérieure susceptible de mettre en cause la responsabilité des autorités américaines dans la crise.  

Le récent sursaut du Tea Party, cette frange extrême du Parti Républicain, incontrôlable et prêt à tout pour affaiblir Washington, donc à se saisir de ce dossier, peut expliquer cette offensive « bi-partisane » contre les banques. Une offensive préventive pourrait-on dire. La charge violente contre les banques serait ainsi pour l’Etat une manière de se blanchir de toute complaisance présente et passée vis-à-vis du monde financier, tout en assurant aux caisses fédérales de substantielles rentrées.

 

 

 

 

 



03/07/2014
0 Poster un commentaire